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DOC-LANTA

Pour ce numéro, la rédaction vous propose de parler de la situation du système de santé, en particulier de la pénurie médicale, et de se projeter dans ce qu'il est encore possible de faire.
Force est de constater qu'il va falloir bricoler, arranger, conjuguer avec une réalité loin des guidelines médicales occidentales et lutter contre la perte de l'égalité d'accès et de prises en charge.
On commence par revenir sur la situation actuelle, et promis, il ne s'agit pas de rester dans la sinistrose mais de rester combatifs et constructifs !

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naufrage du système
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Désert, sous-dotation, pénurie, vacances de postes : autant de mots employés pour parler de carence des effectifs médicaux. Pour y voir plus clair, nous avons demandé aux ARS quels sont leurs indicateurs dans ce domaine.

01 - L’indicateur APL - Accessibilité potentielle localisée 

L’indicateur APL (pour les médecins généralistes)

Il mesure la consommation de soin. C’est-à-dire le nombre de consultations de médecins généralistes par habitant  apporté à l’âge et à la santé de la population.
Cet indicateur se base sur un principe : quand il y a beaucoup
de consultations par habitant cela signifie que la consultation est facile, que l’on ne manque pas de médecins.
Au contraire, peu de consultations signifie une difficulté d’accès aux médecins généralistes. Le terme de désert médical n’est pas approprié car il n’existe pas de zone sans aucun accès aux soins. Ainsi, on privilégie plutôt un classement en 3 catégories :

01 Zone d’intervention prioritaire (ZIP) :
Zone où les mesures d’aide à l’installation sont les plus importantes. En plus grande difficulté que les autres, elle est classée ZIP lorsque le nombre de consultations est inférieur à 2,5 par habitant et par an. Cela concerne par exemple 62 % du territoire francilien.

02 Zone d’accompagnement complémentaire (ZAC) :
Ce sont des zones moins fragiles mais où des moyens doivent être mis en oeuvre pour éviter que la situation se  étériore. Elles correspondent souvent à des endroits où  lusieurs médecins généralistes vont partir à la retraite. Elles doivent être surveillées. Une zone est classée ZAC lorsqu’on y compte entre 2,5 et 4 consultations par an et par habitant (4 étant la moyenne nationale) Cela représente pour le  même exemple 37 % de la population francilienne.

 

03 Hors zonage :
La situation est au moins dans la moyenne. Pour autant,  cette classification par consultations par an et habitant n’est pas immuable ; l’ARS conduit un travail de concertation avec l’ensemble des acteurs concernés pour réajuster le zonage en tenant compte des spécificités de chaque territoire.

02 - Le nombre de postes vacants à l’hôpital 

Le nombre de postes vacants à l’hôpital par spécialité
Le deuxième indicateur pris en compte pour déterminer s’il
y a une pénurie médicale est le nombre de postes vacants
à l’hôpital par spécialité. Tout ce qui en découle est pris en
compte : difficulté à faire fonctionner un service d’urgence,
une maternité... Les seuils d’alerte sont donc variables
selon les spécialités. Il est cependant très difficile de savoir ce qu’il en est réellement, souvent le nombre annoncé est inférieur à la réalité de la situation ! Notamment pour ne pas effrayer des candidats potentiels…
Tout cela sans compter que ces données concernent les
médecins mais certains services ne peuvent pas fonctionner
par manque de personnel paramédical.

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caractériser la pénurie des territoires
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Sources :

Les Disparités territoriales en matière de vieillissement et d’accès aux soins, Nathalie Chataigner et Clémence Darrigade, Caisse des Dépôts, mai 2022

« Personnes âgées : l'accès à une offre libérale de soins infirmiers meilleur dans les communes où le revenu médian est plus faible », APM News, 12 mai 2022

Lettre ouverte du Collège de la HAS à tous ceux qui œuvrent pour la qualité des soins et des accompagnements, mars 2022

France Info, « Hôpital : « Il nous manque 8 % d’infirmières », alerte Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP », avril 2022 

Allain, S., Naouri, D., de Peretti, C. « En France, les AVC sont plus fréquents, plus graves et moins souvent pris en charge en unité spécialisée pour les personnes les plus modestes ». DREES, Études et Résultats, 1219 février 2022

« Renoncement aux soins : la faible densité médicale est un facteur aggravant pour les personnes pauvres », DRESS, juillet 2021

« "Des départs massifs de soignants" : la commission d’enquête du Sénat face à la déliquescence de l’hôpital », Public Sénat, décembre 2021.

Nurse staffing and education and hospital mortality in nine European countries: a retrospective observational study, The Lancet, février 2014

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rescapés du sytème de sant en chiffres
la disette de médecins nuit à la santé
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Le manque de médecins et d’infirmiers et infirmières impacte la santé des Français. Si ces conséquences restent difficiles à chiffrer, pour autant elles commencent à se voir.

Les pénuries médicales ne sont pas nouvelles, mais les prochaines années s’annoncent encore moins radieuses. À l’hôpital public par exemple, le manque de soignants a des conséquences sur le nombre de lits fermés mais aussi sur la qualité des soins. Déjà en 2014 The Lancet avait publié une étude à ce sujet. Les chercheurs mettaient alors en évidence que le risque de mortalité augmentait à partir de 7 patients par personnel infirmier. En d’autres termes, au-delà de 6 personnes à gérer en simultané, les soins ne sont plus optimum. Chaque patient supplémentaire augmente de 7 % le risque de mortalité de l’ensemble des personnes hospitalisées.

Et pourtant : « Dans nos hôpitaux, il n’est pas rare qu’une infirmière doive s’occuper de 16 patients en journée, voire 24 la nuit », expliquait Véronique Hentgen du Collectif Inter-Hôpitaux devant la commission du Sénat en décembre 2021. Même analyse du côté de la HAS. « Ces pénuries compromettent inévitablement la qualité des soins et des accompagnements », expliquait la HAS dans une lettre ouverte publiée en mars dernier.

 

« Là où il y a des postes vacants, il y a des pertes de chances pour la population locale , souligne Caroline De Pauw, sociologue de la santé et directrice de l’URPS Haut-de-France Médecins. On tourne cette question dans tous les sens mais si l’on veut faire baisser la mortalité prématurée évitable, il va falloir à un moment donné une politique de santé ambitieuse pour définir les besoins en santé. »

D’autant plus que « sur du long terme, c’est à dire plus de 10 ans, les études scientifiques ont démontré que l’investissement en santé, c’est-à-dire en ressource humaine, se traduit par une baisse de la mortalité et une population en meilleure santé », ajoute Julien Mousques, directeur de recherches à l’IRDES et économiste.

 

Dans le détail, si ces pénuries impactent l’ensemble de la population, les personnes vulnérables et âgées restent les premières touchées, notamment les plus de 60 ans qui vivent en zone rurale, explique la Caisse des dépôts dans une étude publiée en mai sur les disparités territoriales en matière de vieillissement et d’accès aux soins. S’ajoutent ensuite les obstacles liés aux ressources financières.

« Quand vous avez affaire à des personnes qui sont en perte d'autonomie, âgées, isolées, et qui n'appartiennent pas au décile supérieur des revenus, évidemment la faiblesse, les défauts ou les manques que l'on constate en termes d'offre de soins sont d'autant plus sensibles, résume Michel Yahiel, directeur des Politiques sociales de la Caisse des dépôts. Il y a une sorte de concentration des difficultés ».

 

La faible densité médicale est en effet un facteur aggravant pour les personnes pauvres, explique la DRESS. « Parmi les personnes qui ont renoncé à des soins, 6,9 % vivent dans une zone très sous-dotée en médecins généralistes (moins de 2 consultations accessibles par an et par habitant en moyenne) contre 4,4 % de celles ayant consulté autant que nécessaire. Toutes choses égales par ailleurs, vivre dans une zone où les difficultés d’accessibilité aux soins sont importantes multiplie le risque de renoncement par 1,8 » expose la DRESS dans une étude datant de juillet 2021. Cela s’explique en partie par des rigidités professionnelles plus fortes pour les personnes précaires, auxquelles s’ajoute un éloignement des soins qui peut occasionner des coûts trop importants. « Les plus précaires n’ont pas de moyen de compensation comme peuvent avoir les CSP+ », ajoute Caroline De Pauw.

De fait, sur la prise en charge des AVC par exemple, les chances ne sont pas les mêmes. « La probabilité qu’un AVC entraîne une paralysie est 22 % plus élevée chez [les personnes précaires] que chez les plus aisés », souligne la DRESS dans une étude datant de février 2022. 

 

Enfin, cette pénurie médicale impacte la prise en charge de manière globale via l’organisation des soins, avec des conséquences sur la santé publique. « Une personne qui ne va pas trouver de spécialiste va se tourner vers son généraliste, souligne Caroline De Pauw. Ce généraliste n’a pas forcément la bonne formation, et si le ou la patiente n’a pas de généraliste cette personne peut décider de renoncer aux soins ou se tourner vers les urgences. » De fait, ces deux situations peuvent déboucher sur des complications médicales ; ce qui augmente, in fine, le taux de mortalité évitable.

Sources :

Les Disparités territoriales en matière de vieillissement et d’accès aux soins, Nathalie Chataigner et Clémence Darrigade, Caisse des Dépôts, mai 2022

« Personnes âgées : l'accès à une offre libérale de soins infirmiers meilleur dans les communes où le revenu médian est plus faible », APM News, 12 mai 2022

Lettre ouverte du Collège de la HAS à tous ceux qui œuvrent pour la qualité des soins et des accompagnements, mars 2022

France Info, « Hôpital : « Il nous manque 8 % d’infirmières », alerte Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP », avril 2022 

Allain, S., Naouri, D., de Peretti, C. « En France, les AVC sont plus fréquents, plus graves et moins souvent pris en charge en unité spécialisée pour les personnes les plus modestes ». DREES, Études et Résultats, 1219 février 2022

« Renoncement aux soins : la faible densité médicale est un facteur aggravant pour les personnes pauvres », DRESS, juillet 2021

« "Des départs massifs de soignants" : la commission d’enquête du Sénat face à la déliquescence de l’hôpital », Public Sénat, décembre 2021

Nurse staffing and education and hospital mortality in nine European countries: a retrospective observational study, The Lancet, février 2014

code rouge : mission survie
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La pénurie médicale, mais aussi paramédicale, se répand. Le système est sous tension ; la pandémie n’a fait qu’accélérer les choses. Il n’y a pas de réponses politiques fortes et systémiques. Que fait-on ?

Il ne s’agit pas tout à fait de vous livrer un plan d’action détaillé et de vous demander de vous y coller ! Non. Juste de dépasser
le constat et de partager des idées, des sujets à investir, tout particulièrement pour limiter la catastrophe sanitaire.
Avant de dépasser le constat, quelques lignes sur celui-ci. Nous invitons nos dirigeants et les professionnels de santé
qui n’en auraient pas encore pris la mesure, à lire les pages précédentes si ce n’est déjà fait. Car nous avons maintenant
besoin que la situation soit reconnue à sa juste mesure. Non il ne s’agit pas de reprendre des activités perturbées par la
pandémie, non il ne s’agit pas de sauver l’hôpital public, non il ne s’agit pas de trouver une solution pour la permanence de soins cet été, non Non NON ! De façon certes hétérogène, l’ensemble du système de santé est concerné : public/privé, permanence des soins/suivi médical généraliste et autres spécialités, éducation en santé, médicalisation du médicosocial (EHPAD, foyers d’accueil médicalisés, etc.)… Nous appelons vivement nos politiques à le dire, à l’expliquer publiquement, avec deux bénéfices à cela : Les professionnels de santé ne seront plus pris dans l’injonction contradictoire de fournir les soins attendus alors que la réalité ne leur permet pas de le faire, ce qui les soulagera d’un des facteurs favorisant le burn-out.
La population saura qu’il ne s’agit pas d’exiger des soins tels que recommandés mais d’obtenir ce qu’il est possible de faire au mieux et que, dans l’idéal, il leur faudra anticiper tout ce qui peut l’être pour leurs besoins de santé. Donc on oublie notre éphémère ministre de la Santé et des Solidarités qui affirma encore en ce mois de juin 2022 au congrès Urgences : « Non, je vous le dis, je n'accepterai pas que l'on fasse croire aux Français que partout, le système s’effondre. », sans autre commentaire…

Et maintenant ? Maintenant on en a pris pour 5 à 10 ans de difficultés, sans encore savoir dans quel état le système de santé en ressortira ni dans quel état de santé sera la population française alors. En dehors des questions d’accès à une prise en charge en situation d’urgence vitale, seul point à faire l’objet de propositions et débats ces dernières semaines, il y a tout le reste à considérer. Ce serait une erreur de penser que l’urgence ce ne serait que celle des urgences. Il faut bien sûr qu’une personne faisant un AVC ischémique puisse être thrombolysée  dans les délais requis. Mais si on ne va pas plus loin, on laissera les situations cliniques, somatiques ou psychiatriques arriver de façon trop conséquente au stade de l’urgence, avec moins de permanences et moins de lits : pas bon…


C’est pourquoi la suite de ce gros dossier vous emmène vers 4 axes de travail qui nous ont paru essentiels pour optimiser les soins et l’activité des professionnels dans une situation carencée : Tout d’abord, considérons la répartition des tâches entre
professionnels de santé. La situation est l’occasion de redéfinir les périmètres d’actes techniques, des soins aux prescriptions
pour les différentes professions médicales et paramédicales. Pour autant, l’ensemble des professions étant concerné par des problèmes de recrutement et de renouvellement, cette question a ses limites. De là, il serait dommage de ne pas s’attarder sur l’évolution des métiers, qui peut permettre une valorisation de l’exercice du soin et remobiliser d’anciens ou nouveaux professionnels !


Ensuite, le meilleur moyen de limiter les besoins en santé, puisque l’offre baisse, est de mettre le paquet sur la prévention. Cela paraît évident ? tant mieux ! Car pas sûr que, face à la pression de la réponse aux symptômes et urgences des malades, on oublie de s’occuper de la santé publique… De plus, cette thématique est probablement de celles qui permettraient de limiter les inégalités sociales de santé et d’accès aux soins pour les plus défavorisés.


Puis le développement de solutions numériques facilitant la coordination des soins, le suivi des pathologies chroniques, l’accès à des professionnels de santé à distance, la réduction des temps administratifs et j’en passe, sera des plus précieux. Il n’en reste pas moins que la sécurité des données et l’éthique à observer les concernant se devront de rester exemplaires.


Enfin, enfin, puisque la réalité ne permet plus de s’approcher du médecin idéal capable de suivre les recommandations des
sociétés savantes et des autorités de santé, la question se pose d’adapter ces recommandations aux moyens réels, au moins temporairement, pour aider les professionnels en charge de l’organisation de soins et de leur dispensation à hiérarchiser les actions à mener et les ressources à déployer.

 

Tout n’y est pas, c’est certain. Mais ces invitations à agir ont au moins le mérite d’exister et de faire la lumière, au-delà des débats, sur la situation exacte de la pénurie aussi bien que des urgences à gérer. Ministère, si tu nous lis…

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Vidéo
répartition des tâches : un mirage ?
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Comment faire face à l’urgence et libérer du temps médical ? En coordonnant davantage les parcours de soins et pour cela en s’appuyant sur les autres professionnels de santé, y compris les petits nouveaux.

Répartition ou délégation de tâches, le sujet qui fâche ? Ou comment trouver des solutions en évitant l’impasse coercitive de la régulation de l’installation… En expérimentant l’accès direct aux masseurs-kinésithérapeutes et orthophonistes ? En élargissant l’accès à la dispensation sous protocole, qui permet au pharmacien de délivrer au patient un ou des médicaments à prescription médicale obligatoire sans disposer d’ordonnance ? Plusieurs mesures sont à l’essai dans le cadre de protocoles formalisés de coopération. Longtemps freinés par une lourdeur administrative décourageante, ils ont cependant été simplifiés par la loi de modernisation du système de santé de juillet 2019. Chaque année, sont développés 4 à 6 protocoles nationaux répondant à des enjeux de santé publique et d’autre part, des protocoles locaux. Cette formule plus souple permet par exemple à des sages-femmes de bénéficier d’une délégation pour le traitement de chlamydia, avec une simple déclaration à l’ARS.

Assistants médicaux

La solution d’embaucher des « aides-soignants de ville » prioritairement dans les territoires sous-dotés, en levant la condition d’exercice regroupée pour le versement de l’aide au recrutement par la CNAM¹ est invoquée par nombre d’observateurs. Une étude réalisée par BVA pour l’Assurance maladie (mars 2021) décrit une aide précieuse aux médecins, notamment grâce à l’accomplissement de tâches administratives « cannibalisant » le temps médical (pour reprendre la formule du CNOM) : accueil des patients, gestion des contacts téléphoniques, mise à jour du dossier du patient, facturation, protocoles, scan des résultats des bilans. Selon l’étude BVA, les assistants médicaux perçoivent leurs missions comme « stimulantes et attrayantes, du fait de la proximité des patients ».

La CNAM évalue que les assistants médicaux ont permis d’augmenter de 1 077 156 patients la file active (patients vus au moins une fois dans l’année en hospitalisation ou en consultation). Au 1er février 2022, 2 809 contrats d’assistants médicaux (pour 1 486 ETP) ont été signés avec les caisses d’assurance maladie par 2 150 généralistes et 560 spécialistes, dont 1 406 contrats signés en zone sous-dense. Un résultat en deçà des objectifs fixés par le Gouvernement à 4 000 assistants en 2022. Un récent rapport sénatorial², rédigé par la commission de l'Aménagement du territoire, portant sur la lutte contre les déserts médicaux, propose de rehausser cet objectif d’embauche « à 10 000 d’ici 2024, pour surmonter le cap difficile du point le plus bas en termes de médecins en exercice, en assouplissant notamment la prise en charge de leur financement dans les zones sous-denses, là où leur effet levier sur la patientèle est le plus fort ».

Manque de lisibilité de la pratique avancée

D’autres solutions structurelles ne montrent pas encore les résultats escomptés. Disposant de compétences élargies, les infirmiers en pratique avancée (IPA) suivant des patients pour leur(s) pathologie(s) chronique(s), peuvent, dans le cadre d’un protocole d’expérimentation, prescrire des examens complémentaires, demander des actes de suivi et de prévention, mais également renouveler ou adapter, si nécessaire, certaines prescriptions médicales. Sans compter, notent les sénateurs du rapport précité², qu’il s’agit d’un facteur d’attractivité dans les territoires désertés : « Une équipe de professionnels paramédicaux impliqués est le gage de bonnes conditions d’installation pour les jeunes médecins, qui portent une attention croissante à la qualité de l’écosystème de santé et des soins. »

Ils sont un peu moins de 1 000 IPA diplômés en mars 2022 (plus 1 425 professionnels en formation dans 27 universités). La mention Pathologies chroniques stabilisées, Prévention et Pathologies courantes en soins primaires rassemble plus de la moitié des effectifs, suivie des mentions Oncologie-Hématologie, Néphrologie-Dialyse et Dialyse… loin devant les mentions plus récentes, Psychiatrie et Urgences. Lorsque 5 000 IPA seront formés (c’était d’ailleurs un objectif de fin de mandature présidentielle), ils ne représenteront que 0,7 % de l’ensemble des 764 000 infirmiers. 

 

En janvier 2022 est paru un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur les dispositifs de partage de compétences entre professionnels et protocoles de coopération. Concernant la pratique avancée, il décrit un « essor contrarié à la fois par la dépendance au médecin qu'elle instaure pour l'accès à la patientèle et un modèle économique inadapté et sous-dimensionné ».

L’une des principales préconisations de la mission est de différencier deux types de pratiques avancées : celle des IPA « spécialisés » et celle d’une autre profession intermédiaire, les IPA « praticiens », professionnels de santé en soins primaires et en population générale sur des pathologies courantes et bénignes… Ceci, bien entendu, à condition de réunir quelques conditions toujours déficientes : un « cadre législatif cohérent » qui permette l'accès direct à la population et la primo-prescription pour les IPA⁴ et la révision du modèle économique ainsi que du financement, en libéral (sur le mode conventionnel) comme à l'hôpital. L'IGAS propose en outre d'expertiser l'accès direct à certains professionnels non médicaux dont les IPA, en coordination avec les médecins traitants.

 

Cependant, le rapport n’estime pas opportun de créer, dans le contexte actuel, une nouvelle profession de santé ex nihilo puisque les IPA constituent déjà une profession intermédiaire et considérée comme telle, même si « leur positionnement dans le Code de la santé publique ne leur reconnaît pas pour l'instant ce statut ».

Sources :

1 L’avenant 7 à la convention médicale du 20 juin 2019 précise que l’aide au recrutement d’un assistant médical concerne les médecins exerçant (sauf exception) de manière regroupée, dans un cabinet d’au moins 2 médecins ou exerçant déjà de manière coordonnée.

2 https://s3-eu-west-1.amazonaws.com/static.hospimedia.fr/documents/220225/7831/r21-5891.pdf?1649424702

3 Une nouvelle prime spéciale pour les IPA de la fonction publique hospitalière est versée à partir du 1er avril 2022.

4 Correction des textes qui interdisent aujourd'hui aux patients de consulter à leur initiative une IPA, et aux IPA de primo-prescrire à leurs patients certains traitements ou prestations, suppression de la mention de patients confiés qui « compromet le développement de l'exercice et contrevient au libre choix du patient ».

le radeau de la prévention
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Les politiques de prévention santé en France affichent des résultats médiocres. Le budget alloué est légèrement inférieur à celui de la moyenne européenne. Surtout, les problèmes organisationnels sont des obstacles majeurs. Pourtant, augmenter l’efficacité de ces politiques pourrait réellement diminuer les recours au système de soins.

« Nous ne sommes pas bons en France, ni sur les dépistages, ni sur la prise en charge des facteurs de risque. La Cour des comptes a même écrit que nos politiques de prévention santé avaient des résultats "globalement médiocres" ! » Le Pr François Alla, chef du service Innovation en prévention au CHU de Bordeaux, ne mâche pas ses mots. Il faut dire que le rapport évoqué*, publié en novembre dernier, dresse un constat implacable concernant 3 grandes pathologies qui génèrent un quart des dépenses de l’Assurance maladie (50 milliards d’euros), à savoir le cancer, le diabète et les maladies neurocardiovasculaires. Un budget prévention annuel estimé à 15 milliards d’euros en France - un montant proche du budget américain ou allemand. Sauf que… les résultats en France « sont très éloignés de leurs cibles ».

Un exemple parlant : sur la vaccination anti-HPV, pour des montants investis similaires, le taux de vaccination tourne autour de 25 % en France alors qu’il se situe entre 30 et 90 % dans les autres pays. La pandémie de Covid-19 a encore accentué cet écart, avec un sérieux retard pris sur les dépistages de cancers lors du premier confinement de mars 2020. Le taux de participation au dépistage du cancer du sein est ainsi passé de 52 % en 2019 à 42 % en 2020.

 

Le flop de la présidentielle

Début 2022, alors que le monde commençait à sortir un peu des affres de la pandémie, la France se lançait dans la campagne présidentielle. Pendant 2 ans, les Français s’étaient focalisés sur le nombre de lits ouverts dans les hôpitaux, sur les pénuries de personnels soignants, sur les avancées de la campagne vaccinale. La santé et la prévention s’étaient imposées comme sujets de préoccupation n° 1. Avec quels prolongements dans les débats présidentiels ? « Il n’y a quasiment pas eu de débat sur ces questions ! La plupart des candidats se sont focalisés sur les déserts médicaux, avec une surenchère sur le nombre de soignants qui seraient embauchés s’ils étaient élus », pointe Laure Millet, responsable du programme Santé à l’Institut Montaigne, think-tank libéral.

« Mois sans tabac » : quelles retombées ?

L’impact de la prévention pour limiter la survenue de cancers et pathologies chroniques n’a pourtant plus grand-chose à prouver. Prenons l’exemple du tabac : c’est la première cause de mortalité évitable selon Santé publique France, avec en moyenne 75 000 décès par an imputables. 1 cancer sur 3 serait ainsi dû au tabagisme. Depuis 2015, la campagne « Mois sans tabac » a lieu tous les ans au mois de novembre. Avec quels résultats ? Elle aurait permis à 1,8 million de Français de tenter l’arrêt du tabac entre 2016 et 2019. « Mais la communication santé grand public seule ne fonctionne pas », tempère François Alla. « La lutte contre le tabagisme avance aussi et surtout grâce à la hausse des prix du tabac, au remboursement des substituts nicotiniques et à la mise en place de Tabac Info Service », ajoute le spécialiste. Est-ce à dire que les Français sont les mauvais élèves de la prévention santé ? Quand on sait que seuls 6,6 % des 13 millions d’adultes fumant quotidiennement utilisent des substituts nicotiniques par exemple, cela pose question sur leur niveau d’adhésion…

Les écueils de la prévention à la française

L’insuffisance des budgets alloués est souvent mise en avant et c’est une réalité : les dépenses affectées à la prévention organisée représentent 1,9 % de l’ensemble des dépenses santé en France (source OCDE State of Health in the EU, p. 10) versus 3 % en moyenne dans l’Union des 27. 

Néanmoins, l’aspect financier n’explique pas tout. « Historiquement, notre système de santé a été construit pour le soin, pas pour la prévention, pointe Laure Millet. Pour faire de la prévention, on ne peut pas s’arrêter à la logique de l’ONDAM sur un an. Il faut voir les économies réalisées par le système de santé dans son ensemble ». Les problèmes organisationnels jouent un rôle majeur dans cet échec. Selon le Pr Alla, il faut cesser d’incriminer les individus et les médecins : « Si les médecins ne font pas de la bonne prévention c’est que les organisations ne s’y prêtent pas ! Quand vous allez à l’hôpital, jamais personne ne vous pose la question de vos vaccinations, de vos dépistages, de votre tabagisme. Pourtant, ce n’est pas compliqué. Un sevrage tabagique avant une opération divise par deux la morbimortalité péri et postopératoire. Si le chirurgien n’a pas de reprise au bloc ni d’infection à traiter, c’est du temps de gagné ! ».

Quelques pistes pour booster la prévention 

Sortir du seul champ sanitaire

« Les principaux leviers ne sont pas chez les médecins. Ils sont entre les mains des pouvoirs publics (éducation, urbanisme, etc.). Par exemple, si je veux réduire l’incidence des infarctus du myocarde et des AVC, le plus efficace est de réduire l’usage du sel dans l’industrie agroalimentaire. » nous indique François Alla.

 Former d’autres professionnels

« Il y a 3 types de professionnels à mobiliser : les paramédicaux (type infirmière Azalée), les "case managers" car ils jouent un rôle essentiel et les acteurs de la prévention au niveau territorial, pour mettre en place des parcours ,précise François Alla. Sans oublier les assistants médicaux. »

 Mieux utiliser les données de santé publique

« Le concept canadien de "responsabilité populationnelle" devrait nous inspirer. Il part du diagnostic de l’état de santé de la population d’un territoire donné pour établir des actions de prévention ciblées. En France, on n’utilise pas assez les données territoriales. Cela s’explique par une centralisation des données et des circuits de décision. Les ARS n’ont pas trop la main pour le moment mais pourraient développer des parcours de soins plus spécifiques, en impliquant les professionnels de santé. », explique Laure Millet.

Pour en savoir plus :

Santé publique année zéro, Barbara Stiegler & François Alla, Gallimard.

Notes

*Cour des comptes LA POLITIQUE DE PRÉVENTION EN SANTÉ Les enseignements tirés de l’analyse de trois grandes pathologies, Novembre 2021. https://www.ccomptes.fr/fr/publications/la-politique-de-prevention-en-sante

une touche côté outils numériques
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À l’heure du « désolé-mais-j’arrive-à-avoir-aucun-RDV-avant-2023 » ou du « désolé-mais-on-a-plus-de-médecins-sur-place », comment garantir une offre de soin optimisée ? Depuis la pandémie, le recours à la téléconsultation a été exponentiel avec plus de 4,5 millions de consultations réalisées en avril 2020. Les outils numériques semblent être une réponse de choix à la situation actuelle, mais est-ce bien suffisant ?

La téléconsultation : une solution manifeste 

Sur les plateformes de téléconsultation, on peut trouver un rendez-vous 7 jours sur 7, sur une large plage horaire et majoritairement sans avance de frais. Chez QARE, près de la moitié des demandes de téléconsultation en médecine générale sont possibles dans l’heure. Mélanie est une utilisatrice convaincue : « C’est ultra pratique, facile d’utilisation et je trouve cela très utile surtout les week-ends ou les jours fériés quand on ne trouve pas de médecins. » Dr Gaspard Prévot est cofondateur de l'Alliance Santé planétaire et téléconsulte régulièrement sur la plateforme LIVI : « Je trouve que c’est intéressant quand les usagers ont besoin d’un avis médical à des horaires compliqués et que l’offre de soin est appauvrie dans certaines zones. De plus, avec ma vision un peu écolo, cela évite certains déplacements inutiles ! » 

 

La téléconsultation n’est pas une consultation « complète » car elle est forcément amputée de la partie de l’examen physique. Néanmoins, les patients reçoivent la plupart du temps des explications, un premier bilan, des conseils, une réassurance, parfois simplement une écoute attentive. Le patient est finalement bien orienté, sa prise en charge est mieux cadrée. « C’est presque une forme de régulation, et c’est très utile quand les patients ont des rendez-vous en ville dans des délais délirants », commente le Dr Julie Salomon, pédiatre et directrice médicale adjointe chez QARE.

 

Si l’application QARE a été créée en 2017 en réponse à un besoin précis, celui des Français de l’étranger, elle a largement étendu sa cible avec les années, catalysée par la crise sanitaire. Chez QARE, 100 000 téléconsultations sont réalisées chaque mois, et ce chiffre a doublé en un an.

Actuellement il y a une demande démesurée de la part des patients qui n’ont pas ou plus de médecin traitant ou qui sont dans l’impossibilité d’obtenir un rendez-vous.  En parallèle, certains médecins, du fait de la répartition hétérogène sur le territoire, peuvent proposer du temps médical. « En consultant en ligne, on répartit de façon plus homogène l’offre et la demande sans subir les contraintes des obligations d’installation dans certaines zones » explique Julie Salomon.

Chez QARE, on retrouve plusieurs milliers de professionnels de santé dont 58 % sont des médecins généralistes. « Tous, à l’exception des retraités, doivent avoir une activité présentielle à côté pour garder le réflexe de la main sur le ventre » précise Julie Salomon. Il y a cependant beaucoup de motifs qui ne nécessitent pas d’examen, l’exemple parfait est aussi le motif de consultation le plus fréquent : la cystite. « Il s’agit d’une urgence ressentie par le patient qui n’est pas une urgence vitale, avec un besoin d’évaluation médicale sans nécessité d’examen clinique, et avec un besoin de prescription médicale. »

Afin d’élargir l’offre de soin, la téléconsultation s’étend aussi dans les officines, mais aussi les EHPAD qui s’équipent d’objets connectés (tensiomètre, oxymètre). Cela enrichit considérablement la consultation, augmente l’information clinique et génère de nouvelles perspectives de soin.

 

Mais qui a aussi ses problématiques…

À qui profite vraiment la téléconsultation ? Quid du risque d’uberisation de la médecine ?

Julie Salomon est claire sur le sujet : « Les brebis galeuses, il y en a en présentiel et en distanciel. Il y en a qui sont là pour faire de l’argent et il y a toujours certains médecins, très à la marge, qui sont dans une productivité financière. Pour autant, ce n’est pas propre à la téléconsultation, ce sont les mêmes qui exercent en présentiel. » Parfois, les patients sont eux aussi dans une logique consumériste ou ont des demandes abusives. Le mésusage de l’outil existe des deux côtés de l’écran.

Si le CNOM agit comme un garde-fou nécessaire et indispensable pour éviter les dérives, le Dr Salomon s’interroge sur le cadre parfois un peu trop rigoriste des instances administratives à l’égard de ce nouvel outil, notamment sur le blocage du temps de téléconsultation à 20 % du temps de travail. Cela limite drastiquement les possibilités pour les médecins et freine l’offre de soin sur le territoire.

La télémédecine est un outil de choix à l’heure de la pénurie médicale. Son usage s’accentue et n’aura de cesse de s’accroître, à défaut de mieux, en conscience, toujours, des fragilités de l’outil. Avec l’essor de toute la téléexpertise notamment en neurovasculaire avec le télé-AVC, mais aussi avec le déploiement de la téléradiologie, le numérique continue de se faire une place dans le champ médical et nous permet d’envisager de nouvelles solutions pour demain. En attendant, et  malgré tout, les deux partis sont unanimes, rien ne remplace une « vraie » consultation ! Pour la solution idéale, on botte un peu en touche…

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Quand les soignants sont trop peu nombreux pour appliquer les recos à la lettre, il n’y a qu’une solution : adapter les guidelines pour aboutir, à défaut des meilleurs soins au monde, aux meilleurs soins possibles. Une dure réalité qui reste taboue pour la profession.

« La mise en œuvre des recommandations de bonnes pratiques professionnelles et organisationnelles, que ce soit dans le champ sanitaire aussi bien que social ou médicosocial, se heurte régulièrement à la question de leur applicabilité. » Dans le contexte de désertification médicale et paramédicale que nous traversons, ce constat pourrait paraître banal… s’il n’était pas dressé par ceux qui sont chargés de valider lesdites recommandations de bonnes pratiques : les membres du collège de la Haute Autorité de santé (HAS). Dans une lettre ouverte publiée fin mars, ces derniers alertaient en effet sur « l’incapacité à délivrer des soins ou des accompagnements de qualité » dans laquelle se trouvent trop souvent les professionnels de santé, faute de collègues en nombre suffisant.

Face à une telle situation, la solution devrait être simple : recruter, afin de pouvoir assurer des soins conformes aux standards les plus exigeants. Le problème, c’est qu’on ne peut pas recruter des soignants qui, dans certains secteurs au moins, n’existent tout simplement pas. Et quand les ressources ne peuvent pas s’adapter aux recommandations, il n’y a qu’une solution logique envisageable : adapter les recommandations aux ressources, afin de tirer le meilleur parti de celles dont on dispose.

On s’adapte… de gré ou de force

Déni de réalité C’est d’ailleurs ce que font, depuis longtemps, les soignants les plus touchés par la pénurie, dont les psychiatres de Seine-Saint-Denis font assurément partie. « Dans le département, il y a des villes entières où les structures de soins ne peuvent prendre aucun nouveau patient, ou seulement ceux qui ont fait un acte auto-agressif, explique le Pr Thierry Baubet, chef du service de psychopathologie à l’hôpital Avicenne de Bobigny. On est donc complètement en dehors des clous, on est au-delà de la non-application des recos, c’est de la non-prise en charge… »

Une situation face à laquelle les soignants séquano-dionysiens sont bien loin de rester les bras croisés : de gré ou de force, ils s’adaptent. « Normalement, à la Maison des ados, la porte d’entrée devrait être le médecin, pour faire un diagnostic et donner la conduite à tenir, poursuit Thierry Baubet. Mais chez nous, les adolescents sont reçus par un binôme infirmier-psychologue, ou psychologue-assistante sociale, qui fait une évaluation sur deux ou trois rendez-vous. Un point est ensuite fait avec le médecin, pour décider s‘il faut des soins ou pas. »

 

Le soin, rien que le soin

Et il serait illusoire de s’imaginer que de telles entorses aux prises en charge théoriques sont l’apanage des spécialités les plus en difficulté comme la psychiatrie, ou des territoires les plus défavorisés comme la Seine-Saint-Denis. « Nous sommes tous frustrés dans notre exercice quotidien par le manque de temps, qui ne nous permet pas d’aller au-delà du soin pur et dur, regrette le Dr Antoinette Perlat, PH en médecine interne au CHU de Rennes. Je pense à un exemple tout bête : nous prenons en charge des patients qui ont un déficit immunitaire, et normalement, si on faisait les choses comme le souhaite notre centre de référence, il devrait y avoir un parcours coordonné quand ils passent d’une prise en charge pédiatrique à une prise en charge adulte. Dans la pratique, on n’a pas le temps de formaliser ce parcours. »

Bien sûr, les soins sont assurés, et la qualité reste au rendez-vous, complète la praticienne bretonne. Mais « le temps pour rencontrer les familles, expliquer les pathologies, les traitements, les effets secondaires », qui est nécessaire pour améliorer l’adhésion et donc l’efficacité des prises en charge, lui, reste tout simplement hors de portée de la pratique quotidienne. Quand un jeune antérieurement suivi en pédiatrie arrive dans son service, au lieu du parcours coordonné attendu, Antoinette Perlat doit donc bien souvent se contenter d’un simple courrier.

Déni de réalité

La grande question, quand on voit comment les équipes s’adaptent, avec les moyens du bord, à la pénurie ambiante, est de savoir si les autorités ne pourraient pas leur venir en aide en les éclairant et en leur fournissant des recos adaptées au contexte de pénurie, un peu à la manière dont certaines sociétés savantes ont su, durant la crise sanitaire, adapter leurs recommandations pour établir des priorités et limiter les pertes de chance. Mais pour l’instant, une telle démarche semble encore loin des mentalités médicales. « Je pense qu’il y a chez nos sociétés savantes une forme de dénégation de la réalité du problème, même en psychiatrie », estime Thierry Baubet, qui pense pourtant qu’on gagnerait à confier, de manière formalisée, davantage de responsabilités à des professionnels tels que les psychologues ou les infirmiers spécialisés.

Son collègue le Pr Bruno Falissard, pédopsychiatre et professeur de santé publique à Paris, est du même avis. « Il va falloir que les autorités s’adaptent et proposent que les soins soient dégradés dans certaines conditions, estime-t-il. La prise de conscience n’est pas encore là, mais elle commence à arriver. » Et le spécialiste de pointer l’émergence d’un nouveau champ de recherche, l’implementation research, qui dispose de ses propres revues, et qui étudie la manière dont les résultats scientifiques théoriques peuvent être traduits dans la vraie vie, avec ses contraintes et ses goulots d’étranglement parfois bien différents du contexte que l’on rencontre lors d’un essai clinique randomisé.

Mais du côté de la HAS, on est loin d’être disposé à se résoudre à adapter les recos à la pénurie de personnel. « Nous ne sommes pas là pour dégrader les recommandations en fonction des moyens disponibles, affirme haut et fort le Pr Dominique Le Guludec, présidente du collège de la vénérable institution. Nous n’avons pas à nous adapter à la pénurie. » Jusqu’à quand ?

passer en mode dégradé un impensé médical
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Alors que le stress et la pression étaient déjà le lot quotidien des médecins, la pandémie n’a rien arrangé… Elle n’a fait qu’accentuer les limites d’un système de santé au bord de la rupture.
Chacun doit maintenant survivre dans ce désert selon ses atouts et ses besoins. D’où l’importance, pour affronter au mieux ce contexte, de bien se connaître ! Répondez sincèrement aux questions et trouvez l’exercice adapté à votre bien-être intérieur. 

1/ Enrôlé dans l’armée, sur une ligne de front,
vous seriez plutôt du genre à vous mettre :

 A   En première ligne, les yeux dans les yeux de l’ennemi.

 B   Au milieu, à une distance adéquate pour voir arriver l’ennemi.

 C   À l’arrière, après tout, si les plus engagés s’en sortent tant mieux. 

2/ Si vous étiez un super-héros,
vous seriez : 

 A   Tony Stark alias Iron-Man.

 B   Professeur Xavier, chef des X-Men.

 C   Peter Parker alias Spider-Man. 

3/ Dans la vie vous avez l’impression d’avoir un rôle : 

 A   Tony Stark alias Iron-Man.Indispensable, sans vous plus rien ne va, vous êtes persuadé de maintenir l’ordre.

 B   Interchangeable, tout le monde est remplaçable et cela ne vous dérange pas.

 C   Bien défini. vous avez votre place ! Du moment qu’on ne vient pas vous embêter, tout va bien. 

4/ En amour, vous êtes plutôt : 

 A  Volage, vous changez de conquête comme de chemise. Il y a trop de cœurs qui s’offrent à vous pour n’en choisir qu’un seul.

 B   Vous êtes un fidèle, inconditionnel amoureux transi, rien ne pourra vous décrocher de votre bien-aimé.

 C   Tant que vous avez le contrôle sur votre relation tout va bien.

5/ Au sein de votre foyer :  

 A   C’est vous qui tenez la maison, tout est très bien organisé. 

 B   C’est ambiance Woodstock.

 C   Trop débordé, vous allez à l’essentiel. En général ce n’est pas vous qui rangez. 

6/ Des vacances idéales, cela signifie : 

 A  Planche de surf sous le bras, combi Volkswagen, vous arpentez les plages de la côte Ouest. 

 B   Vous ne savez pas trop où partir. Près de votre lieu de travail au cas où il y aurait une urgence, on ne sait jamais !

 C  Direction votre résidence secondaire sur l’île de Ré. 

7/ Dans une autre vie vous seriez :  

 A   Avocat ou fonctionnaire.

 B   Startuper.

 C   Saisonnier, quoi de mieux que de travailler d’arrache-pied 6 mois avant de profiter pendant 6 autres mois ?

8/ C’est samedi soir, vous optez pour :  

 A    Tenue de soirée, palace et champagne. 

 B   C’est ambiance Woodstock.

 C   Trop débordé, vous allez à l’essentiel. En général ce n’est pas vous qui rangez. 

9/ Votre plus grande qualité : 

 A   L’organisation et l’écoute. 

B   La réactivité et la loyauté.

 C   La sérénité et le détachement.

10/ Face à une dispute dans la rue :  

 A   Vous passez vore chemin.

 B   Vous dialoguez pour calmer la situation.

 C   Vous vous interposez direct.

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le grand test

2e mandat, 2e ministre, 7e vague Covid.

L'été débute dans un état de tension majeure du système quand chacun attend de prendre ses vacances, bien méritées... Pourtant il faut y aller ! On veut encore y croire, mais la nouvelle équipe Santé, le Dr Braun en tête, devra faire ses preuves tant les déceptions et les épuisements se sont cumulés.

Avec 41 mesures pour les soins non programmés à +/- court terme mais sans autres encore pour le reste du système, et 3,5% d'augmentation dans la fonction publique, il faudra plus évidemment.
Cela passera probablement par un nouvel équilibre entre un déficit toujours compliqué à gérer côté budget, un défaut grandissant d'accès aux droits santé quand des organismes complémentaires et un milieu industriel restent plutôt florissants... Bref Dr Braun, au travail !

conclusion
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